Mission Sanitaire dans la poche de Lorient

[Pierre-Antoine]

La veille du 8 mai 1945, je rencontre à Vannes, le commandant de notre Bataillon(19ème Bataillon Médical) de la 19ème DI : le médecin Colonel LACOMBE. Je lui fais part de ma joie la suite des bonnes nouvelles que nous venions d'apprendre à la radio. Lui aussi en était heureux. Sachant que j'étais Lorientais, il me fit l'honneur de me convoquer à son bureau le lendemain matin pour me dire qu'il m'avait choisi comme guide de la mission sanitaire qui avait été décidée entre les Français et les Allemands (Croix Rouge) afin d'apporter les soins nécessaires aux blessés et aux malades des deux camps. Notre mission était composée des Médecins Capitaines: Dr Azouglay - Dr Cachin, du capitaine Chantome, officier d'administration, de soldats infirmiers et interprètes, Le Gal, Danion, moi-même Pierre Porgroult Sergent infirmier, choisi comme guide (en tant que Lorientais).

Le rendez-vous avec les Allemands était aux environs de la Montagne du Salut (Sur la commune de Caudan, au niveau de la voie express lorsque l'on arrive à Lanester en venant de vannes). Les Allemands nous y attendaient, nous devions les suivre, ils nous escortaient. Arrivés à Lorient, une partie de notre convoi guidé par les Allemands a pris la direction de l'hôpital Maritime (En face de DCNS, sur l'autre rive du Scorff), l'autre dont je faisais partie se rendit au sanatorium de Kerpape. Les Allemands nous logèrent le premier soir dans des baraques. Le lendemain matin, les allemands nous réunissent dans une salle. Les Allemands étaient assis autour d'une grande table. Nous les Français debout "sur leur ordre". Tout à coup nous entendons des sonneries, téléphone et radio sans doute? Un de nos interprètes, Le Gal ou Danio, nous signale que les Allemands ont reçu l'ordre de se rendre.

L'armistice ayant mis fin à l'état de guerre. Notre Capitaine Chantome, dit aux interprètes donnez de donnez l'ordre aux Allemands de nous céder leurs places, eux debout, nous assis. La nourriture que les Allemands nous avaient donnée laissait plutôt à désirer, surtout leur pain. Le capitaine Chantome me dit : "Porgroult, vous allez partir à Larmor Baden chercher du ravitaillement". Une voiture Allemande avec chauffeur allemand est mis à ma disposition. Arrivés Cours de Chazelles, un bataillon Français entrait dans Lorient, un soldat apercevant notre véhicule "allemand" saisit sa mitraillette et s'apprêtait à tirer. J'explique que je faisais partie de la mission du 19ème Bataillon Médical et que l'on m'avait chargé d'aller chercher du ravitaillement à Larmor Baden. Arrivés à Larmor Baden, tous ont fait le nécessaire pour que notre retour soit facilité. Notre Capitaine Chantome, nous invita à quitter les cabanes et de donner l'ordre aux allemands de mettre leurs chambres à notre disposition. Il nous avait été recommandé de circuler avec prudence aux alentours de Kerpape, car il y avait des mines dans les parages. Sous les ordres des militaires français, des soldats allemands avaient été chargés de marcher côte à côte en enfonçant leurs baïonnettes dans le sol. Des mines ont explosé faisant un bon nombre de victimes allemandes. Les baraques que nous avions occupées le jour de notre arrivée, étaient à proximité de l'endroit de l'accident. Le Docteur chirurgien Azoulay, Israélite, dont la famille avait souffert sous l'occupation allemande les soigna. Par la suite le déminage se fit avec des spécialistes et du matériel approprié.

Récit de Pierre PORGROULT, extrait de "Ami entends-tu..." n°87.